Séance de questions d'actualité au gouvernement du 19 mars 2013

19 mars 2013

Mardi 19 mars 2013, Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, est intervenu à six reprises lors de la séance de questions d'actualité au gouvernement, à l'Assemblée nationale.


Réponse à Jean-Luc Moudenc, député UMP de la Haute-Garonne

Jean-Luc Moudenc, député UMP de la Haute-Garonne

Monsieur le Président, il y a un an jour pour jour, la barbarie frappait à Toulouse. Elle frappait la communauté juive comme elle avait frappé quelques jours auparavant des militaires de notre armée à Montauban et à Toulouse. A travers ces crimes, c’est la France qui était touchée, à travers ces crimes, c’est la République qui était mise en cause et je veux ici devant la représentation nationale faire mémoire de celles et ceux qui sont tombés, victimes de ces crimes, de cette barbarie. Je veux faire mémoire de Imad ibn Ziaten, Abel Chennouf, Mohamed Legouad, Jonathan Aryeh et Gabriel Sandler, Myriam Monsonego, et je veux avoir aussi une pensée pour les blessés graves, Loïc Liber et Aaron Bryan Bijaoui. Et je veux aussi nommer les deux mots qui ont armé le criminel : l’antisémitisme et l’islamisme radical. Et je me tourne vers le gouvernement pour qu’il nous indique quelles sont les actions qu’il compte conduire pour faire reculer ces deux mots. Je vous remercie.

Manuel Valls, ministre de l’Intérieur

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le député. Vous avez trouvé les mots justes pour rappeler ce qui s’est passé il y a un an à Toulouse et à Montauban. Trois soldats ont été tués parce qu’ils étaient soldats, un père et trois enfants ont été tués parce qu’ils étaient Juifs et vous avez raison d’indiquer que c’est bien l’antisémitisme, la haine du Juif, mais aussi la haine de la France, de la République et de ses valeurs qui étaient au cœur de cette entreprise criminelle. Et face à cela, et le président de la République l’a rappelé dimanche à Toulouse et vous y étiez, Monsieur le député, c’est la France qui était attaquée et le président de la République a rappelé que la meilleure réponse avait été donnée par les Français eux-mêmes au moment de la campagne électorale, et encore aujourd'hui en se retrouvant, en se rassemblant, et en se rassemblant autour des valeurs de la République. Le gouvernement a mis en œuvre, même si c’est difficile, face à ces risques terroristes et à ce terrorisme que nous combattons au Mali et à ce terrorisme auquel nous faisons face dans notre pays, les moyens en réformant la direction centrale du renseignement intérieur, mais en votant aussi à une très large majorité, et je veux encore en remercier la représentation nationale, une loi anti terroriste qui donne davantage de moyens à nos services pour lutter contre le terrorisme qui est l’ennemi de la démocratie, de la valeur, de nos valeurs de la République et de la France.

Réponse à Valérie Lacroute, députée UMP de Seine-et-Marne

Valérie Lacroute, députée UMP de Seine-et-Marne

Monsieur le Président, merci. Ma question s’adresse à Monsieur le Premier ministre. Chaque jour, des milliers de Franciliens empruntent des trains bondés, en retard, sans chauffage et parfois sans éclairage pour se rendre à leur travail. C’est la France qui se lève tôt et qui s’apprête à payer vos nombreux impôts supplémentaires. Aujourd’hui, je tiens solennellement à tirer la sonnette d’alarme en matière de sécurité. En effet, samedi dernier, une rame du RER D a été attaquée dans l’Essonne en gare de Grigny par une bande manifestement bien organisée et hyper violente. Telles les attaques de diligences dans le Far-West, les passagers ont été détroussés par une horde de sauvages de 30 individus, visage dissimulé, n’hésitant pas à frapper. Une scène de cauchemar pour les usagers de ce train de banlieue victimes d’actes de piraterie qui ne cessent de se multiplier. Trop c’est trop, assez de belles phrases, Monsieur le Premier ministre ! Assez du détricotage des mesures pénales que nous avions prises ! Encore hier, Madame la Garde des Sceaux, vous annonciez la fin des jurés populaires en conditionnelle et aujourd’hui, vous comptez faire disparaître les peines-planchers et abroger la rétention de sécurité. Les Français sont en colère, ils ne se reconnaissent pas dans votre politique qu’ils ont d’ailleurs sanctionnée dans les urnes dimanche dernier lors de la législative dans l’Oise. Vous le savez, votre échec est cuisant après seulement 10 mois de gouvernance ! Alors, Monsieur le Premier ministre, comment oser dire que la délinquance est en baisse ? Quand allez-vous enfin vous préoccuper de la sécurité des Français ?

Manuel Valls, ministre de l’Intérieur

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, Madame la députée, je vous remercie pour votre question. Il se trouve que je connais bien cette ligne D du RER pour l’avoir empruntée comme d’autres parlementaires, je n’en doute pas, qui siègent dans cet hémicycle. Est-ce que vous allez faire croire un seul instant, Madame la députée, aux Français que les événements qui viennent sont liés à telle ou telle de vos déclarations ou à telle ou telle de vos analyses. Après 10 ans d’une politique de sécurité ou de justice qui devait régler tous les problèmes, je constate que malheureusement une partie de notre jeunesse, une partie de nos quartiers à l’abandon se livre en effet à des actes tout à fait intolérables. Mais arrêtez d’exploiter en permanence ces sujets à des fins politiques ! Exploiter ainsi les sujets ne règle aucun problème ! Oui, il y a de la violence dans la société et vos lois en matière de sécurité et vos lois pénales n’ont rien réglé ! Alors oui il faut une autre approche en matière pénale comme en matière de politique de sécurité ! Et cette approche, Madame, ce sont davantage de moyens pour la police et pour la justice parce que pendant des années vous avez sabré, vous avez enlevé, vous n’avez pas donné les moyens à la police et à la justice pour faire face à cette violence ! Alors nous sommes nous déterminés, avec Christiane Taubira, à lutter contre la violence et à faire en sorte que la police, la gendarmerie et nos magistrats soient plus efficaces, aient davantage de moyens et des lois qui s’appliquent réellement ! Car vous avez légiféré, mais vous n’avez pas pu appliquer des lois qu’attendaient les Français ! Avec ce gouvernement, nous ne laisserons pas passer cette violence et je veux vous faire part de ma détermination et de notre détermination à lutter contre cette violence intolérable !

Réponse à Hervé Mariton, député UMP

Hervé Mariton, député UMP

Monsieur le ministre de l’Intérieur, sur la dernière année, les vols avec violence ont augmenté alors que dans l’année qui précédait, ils avaient baissé, cela justifierait un peu moins de mépris à la question posée par notre collègue Lacroute tout à l’heure. Monsieur le ministre de l’Intérieur, hier vous interdisiez tous les trajets demandés par La Manif pour Tous pour le 24 mars, une manifestation pour la famille, une manifestation pour le droit des enfants. La manif demande, par exemple, une des douze avenues qui mènent à l’Etoile. En accordez-vous une seule ? Aucune ne trouve grâce à votre analyse. Vous les avez toutes refusées, vous voulez casser, vous voulez scinder la manif, vous ne voulez pas la voir, vous refusez vous et le gouvernement, en réalité, que l’opposition s’exprime. Dois-je rappeler le propos il y a quelques jours de Madame Taubira dans l’hebdomadaire Les Inrockuptibles, où Madame Taubira voulait trucider je cite, trucider les députés de l’opposition et vous en souriez. Pour un ministre de la Justice, ça n’est pas un très bon exemple. Aujourd'hui encore et depuis neuf mois, vous attaquez la famille, vous contestez les allocations familiales perçues par des foyers gagnant 4.400 euros. 2.200 euros pour chaque membre du couple, est-ce que ce sont des riches ? Alors dans la crise, vous fracturez la société. Ne soyez pas surpris que 64% des Français s’opposent à votre politique. Alors concrètement, monsieur le ministre où consentez-vous, où consentirez-vous à ce que ces Français puissent manifester leur opposition dimanche ?

Manuel Valls, ministre de l’Intérieur

Monsieur Mariton, en matière de lutte contre la délinquance ou contre l’insécurité, au vu des violences sur les personnes et de l’augmentation des cambriolages depuis plusieurs années, j’invite chacun et chacun y prend sa part, à la plus grande modestie. Deuxièmement, je réponds à votre question, il y a une tradition républicaine, puisqu’il y a eu des courriers très précis là-dessus, qui est de ne pas manifester sur les Champs-Elysées et elle s’applique à tous et le principe d’égalité doit prévaloir en la matière, malgré un dialogue quotidien et des propositions alternatives situées sur des parcours tout aussi prestigieux, Denfert-Rochereau, Place d’Italie, Bastille ou Nation, la préfecture de police a rencontré une attitude peu coopérative et un refus d’examiner tout autre itinéraire que celui des Champs-Elysées. C’est uniquement sur ce fondement que le préfet de police a été amené à prendre un arrêté d’interdiction et à contre cœur, Monsieur le député. La porte du préfet de police reste ouverte, si les organisateurs souhaitent revenir à une attitude plus constructive, sachant qu’un service d’ordre adapté ne peut pas s’improviser. Monsieur le député, ne jouez pas au martyre, le droit de manifester est un droit constitutionnel, il nécessite un dialogue constructif entre le préfet et les organisateurs de cette manifestation, il y a déjà eu une manifestation, un itinéraire peut être trouvé, ça ne sera pas les Champs-Elysées, mais Paris est grand et offre d’autres possibilités ; vous ne ferez croire à personne qu’il n’y a pas eu un débat, qu’il n’y a pas eu un Parlement qui s’exprime, qu’il n’y a pas une volonté et puisque vous faites appel aux sondages, je vous rappelle que les Français, majoritairement, sont favorables au mariage pour tous.

Réponse à Guy Teissier, député-maire UMP des IXème et Xème arrondissements de Marseille

Guy Teissier, député-maire UMP des IXème et Xème arrondissements de Marseille

Ma question s'adresse à Monsieur le ministre de l'Intérieur. Monsieur le ministre de l'Intérieur, une semaine et six morts séparent l'intervention de notre collègue Valérie Boyer que j'associe d'ailleurs à ma question sur la violence à Marseille et votre réponse distanciée, je dirais, pour ne pas arrogante, que vous affectez séance après séance. À l'occasion d'un déplacement à Marseille de Monsieur le Premier ministre, ce dernier avait déclaré qu'il ferait de Marseille une priorité. Vous êtes, vous, venu, Monsieur le Ministre, six fois et vous avez déclaré que vous aviez une volonté farouche de pacifier Marseille. Au-delà des grands mots, qu'en est-il ? La spirale de la violence s'intensifie. On assiste impuissants à des règlements de comptes entre narcotrafiquants. Des commerçants sont bannis de leur quartier et ce matin encore, une victime innocente a été à constater, à la suite d'une prise d'otages. On ne peut que constater tristement l'échec de votre politique. Et ce ne sont pas les deux-cents gendarmes et CRS que vous avez envoyés récemment – lesquels gagneront très vite d'ailleurs leur caserne d'ici à quelques jours – qui arriveront à faire taire la mélopée des kalachnikovs. Monsieur le Ministre, je vous le dis, malgré la volonté qui vous anime, vous échouez et vous échouerez parce que vous avez décidé de concentrer vos efforts sur les quartiers nord et pas sur l'ensemble de cette ville. Votre réponse n'est ni globale ni équitable. Vous échouerez parce que vous et vos collègues ne voulez pas tirer les leçons d'une politique d'assistanat qui a corrompu le pacte social, le sens de l'effort et la responsabilité individuelle. Vous échouerez parce que vous dites avoir déclaré la guerre aux trafiquants de drogue pendant que certains de vos collègues ici plaident publiquement en faveur de la dépénalisation du cannabis. Vous échouerez enfin parce que, face à une criminalité nouvelle enkystée au plus profond de certaines banlieues, il faut apporter de nouvelles solutions, il faut doter la police d'un service unique. Bref, il faut changer de stratégie. Enfin, cette tragique réalité exige un traitement à la hauteur, c'est-à-dire une tolérance zéro. Monsieur le Ministre, si vous ne voulez pas rester le ministre de la Parole, vous devez...

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur Teissier, Marseille est malade de la violence, oui. Elle est malade de la pauvreté également. Et, Monsieur Teissier, cette ville est aussi malade de l'abandon depuis des années des pouvoirs publics. Des quartiers de Marseille ont été abandonnés et la violence, malheureusement, Monsieur Teissier, depuis quelques mois, mais aussi depuis des années, avec son lot de morts, de trafics de drogue, oui, est là depuis présente. Ce gouvernement a décidé de faire de Marseille une priorité. C'est difficile et ce sera long. Des moyens supplémentaires ont été déjà mis en place (deux cent vingt policiers et gendarmes). J'ai décidé – et de manière durable – de faire appuyer cette action et cette stratégie d'occupation du terrain par des CRS et des gendarmes mobiles depuis plusieurs jours et ils resteront longtemps. Nous avons décidé de créer des zones de sécurité prioritaires dans les quartiers nord et dans les quartiers sud. Nous avons décidé de poursuivre le travail en centre-ville et je me réjouis qu'enfin, même si ça a été bien tard, la municipalité de Marseille ait décidé de lancer la modernisation de sa police municipale et de mettre en œuvre la vidéoprotection. Et j'ai lancé déjà un appel pour combattre la violence, la drogue qui tue aussi. Pour combattre cette pauvreté, il nous faut un pacte. Au-delà des mots, des polémiques, de l'absurdité de vos propositions, il nous faut un pacte entre les élus locaux de tous bords et l'État, pour venir, pour attaquer cette violence qui enracine la société marseillaise. Monsieur le député, moi, je vous le dis, travaillez avec Jean-Claude Gaudin, travaillez avec le préfet Bonnetain. Faites en sorte, plutôt que de vous diviser au sein de votre camp ou entre la droite et la gauche dans cette ville, que chacun prenne ses responsabilités. Marseille a été abandonnée. L'État, aujourd'hui, fait de Marseille une priorité et luttera de manière acharnée contre cette violence malgré vous !

Réponse à Arnaud Richard, député UDI des Yvelines

Arnaud Richard, député UDI des Yvelines

Merci, Monsieur le Président. Ma question s'adresse à Monsieur le ministre de l'Intérieur. Monsieur le Ministre, l'attaque du RER D de samedi dernier à Grigny témoigne du climat d'impunité qui règne désormais dans notre pays. Comment tolérer que des bandes de voyous sèment la terreur dans les transports franciliens ? Au-delà de Marseille, qui reste le théâtre toutes les semaines d'assassinats, c'est malheureusement la France toute entière qui enregistre la recrudescence de la délinquance. Cette affaire est grave, mais l'information lente à sortir. Monsieur le Ministre, vous qui êtes habitué aux effets de manche et habitué aux réponses toujours très volontaristes, vous avez été bien silencieux sur cette affaire qui est sortie au détour d'une dépêche en fin de journée dimanche soir. Oui, il faut beaucoup de modestie en la matière. Député de Chanteloup-les-Vignes, je sais combien la lutte contre la sécurité dans les quartiers est difficile à mettre en œuvre. En réalité, c'est la délinquance et la conséquence des propos du garde des Sceaux qui provoquent de tels phénomènes de société. Cet échec, mes chers collègues, c'est celui du gouvernement qui prône l'impunité et cherche des excuses aux délinquants aux dépens des victimes. D'évidence, Monsieur le ministre de l'Intérieur, votre gouvernement est tiraillé entre deux positions opposées et irréconciliables : entre répression et déresponsabilisation. Alors, Monsieur le ministre de l'Intérieur, ma question est simple et c'est bien dommage que le Premier ministre ne soit pas là pour y répondre : le gouvernement penche-t-il en votre faveur et en la faveur de la fermeté ou en la faveur du garde des Sceaux et en la faveur du laxisme ?

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le député, comme vous, j'ai été élu de ces quartiers ô combien difficiles et où la violence est enracinée et où le trafic de drogue a fait des ravages majeurs. Et là, dans ces quartiers, nous avons besoin, évidemment, des forces de l'ordre, nous avons besoin du travail de la justice, nous avons besoin de faire respecter des règles, nous avons besoin que l'autorité revienne à tous les niveaux et qu'elle s'applique, nous avons besoin de laïcité. Et croyez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, en sortant quelques secondes de mes fonctions, je veux vous dire combien je regrette la décision de la cour de cassation aujourd'hui sur la crèche Babilou et sur cette mise en cause de la laïcité. Mais, Monsieur le député, je veux vous dire quelque chose : malgré vos questions à répétition, il n'y a qu'une seule politique, celle du président de la République et du Premier ministre, celle que nous mettons en œuvre avec Christiane Taubira. Et croyez-moi, pour les policiers, pour les gendarmes comme pour les magistrats, nous donnons, Christiane Taubira et moi, une autre image de ce qu'est l'État de droit. Jamais dans ce gouvernement un ministre de l'Intérieur ne mettra en cause l'action des magistrats et jamais dans ce gouvernement un garde des Sceaux ne mettra en cause le travail de la police et de la gendarmerie. Voilà la différence ! Parce que, Monsieur le député, pour être efficace, pour que la chaîne pénale veuille vraiment fonctionner, pour que les hommes et les femmes qui travaillent dans des conditions difficiles, parce que votre majorité ne leur avait pas donné les moyens, nous avons besoin que la garde des Sceaux et le ministre de l'Intérieur travaillent main dans la main parce que c'est notre conviction, la sécurité est une priorité et la justice doit être efficace, ce qu'elle n'était pas avec vous !

Réponse à Marion Maréchal-Le Pen, députée FN du Vaucluse

Marion Maréchal-Le Pen, députée FN du Vaucluse

Ma question s'adresse à Monsieur le ministre de l'Intérieur. Dans un article paru vendredi dernier, Monsieur le Ministre, vous vous rendez enfin à l'évidence. Vous dénoncez que la majorité des Roms ne souhaitent pas s'intégrer dans notre pays, déplorant leur organisation en réseau mafieux. Et je n'exploite pas le sujet, Monsieur le Ministre, je rejoins votre constat parce que vous avez raison, ces réseaux délinquants prospèrent grâce aux faux mendiants, à la prostitution, aux bandes d'enfants pickpockets, aux jeux illégaux, aux cambriolages ou aux vols de métaux. Ils bénéficient d'ailleurs la plupart du temps d'une immunité pénale. Vous reconnaissez qu'une partie des Roms ont vocation à retourner dans leur pays d'origine, tout en évoquant la nécessité pour les autres de programmes d'intégration. Pouvez-vous nous préciser, Monsieur le Ministre, quels seront les critères pour choisir l'une ou l'autre de ces voies et quelles seront leurs proportions respectives ? Par ailleurs, la Roumanie et la Bulgarie s'apprêtent à rentrer dans l'espace Schengen, supprimant définitivement le peu de restrictions déjà inappliquées de la circulation des Roms. Vous devriez donc en toute logique vous opposer fermement à ces entrées. Est-ce le cas, Monsieur le Ministre ? La France n'a pas les moyens de les accueillir décemment, de leur fournir un emploi, de les reloger, de les nourrir ou de les soigner. Comment ferons-nous face lorsqu'ils arriveront demain par dizaines de milliers en toute légalité ? Les politiques font l'autruche. Les préfets sont impuissants, les expulsions inefficaces, les camps déplacés pour être soustraits à la vue de tous, mais les faits sont là. Face aux millions consacrés à l'insertion, est-il aussi permis, dans ce pays, de s'indigner pour le Français moyen avec ses deux enfants qui n'a rien d'autre que son SMIC, lui, pour joindre les deux bouts ? Lui, le grand oublié des élites françaises, qui aimerait bien aussi être relogé, avoir des loyers payés par la collectivité et se voir fournir des bons alimentaires. Comme disait Rousseau, Monsieur le Ministre, tel philosophe aime les Tartares pour se dispenser d'aimer ses voisins. Ma question, Monsieur Valls : allez-vous faire mentir Rousseau au profit de Montaigne, qui écrivait que c'est une belle bien chose lorsque le dire et le faire vont ensemble ?

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le Président, Madame la députée, vingt-mille personnes (hommes, femmes, enfants) de culture rom, originaires essentiellement de Roumanie, vivent aujourd'hui dans plus de quatre-cents campements de France et deux-tiers se situent essentiellement en Île-de-France. Et depuis cet été, nous agissons parce que nous considérons que les conditions de salubrité, le péril pour la santé et la sécurité de ceux qui occupent ces campements, les tensions que cela peut générer avec les quartiers nécessitent une politique assumée dans ce domaine-là. Elle s'est traduite par plusieurs milliers de reconduites à la frontière encore au courant de l'année 2012, par la fin de l'aide au retour qui avait été mise en place par le gouvernement précédent et qui créait un circuit permanent vers notre pays et par l'application de la circulaire du 26 août dernier qui, en plus, du démantèlement, des reconduites à la frontière, prône à la fois une politique européenne – et de ce point de vue-là, nous avons, aujourd'hui, des relations constructives avec les autorités roumaines, avec la signature notamment d'un plan d'insertion pour une centaine de projets en Roumanie, que j'ai eu l'occasion de signer avec Bernard Cazeneuve il y a quelques semaines – et puis, évidemment, une politique qui fait sa part au logement à travers, par exemple, les villages d'insertion, le travail – ça a été le sens de ce qui a été amorcé par mon collègue Michel Sapin – et puis, évidemment, le respect des lois concernant l'école. C'est un dossier difficile qui, là aussi, doit nous éloigner de toute exploitation, qui doit nous permettre de regarder la réalité en face, celle que vivent ces populations comme les habitants qui sont dans ces quartiers populaires et qui souffrent déjà de biens de difficultés et d'appliquer tout simplement la devise la République car il s'agit d'être humains, car il s'agit de personnes en grande difficulté à qui nous devons offrir, évidemment, des solutions. C'est cette politique, Madame, qui devrait rassembler une grande majorité de l'Assemblée.